Un tendre baiser d’amitié
Voici une scène adorable : un jeune garçon embrasse timidement la joue d’une petite fille au soleil levant. Cette illustration enfantine porte pourtant un message bien adulte.
Pour cause, ces deux enfants n’ont rien d’ordinaire. Le garçon revêt un uniforme militaire américain de la Première Guerre mondiale. La tenue est reconnaissable à sa couleur, sa forme ajustée, sa ceinture aux multiples poches et, surtout, à son large chapeau de feutre. Cet enfant représente les États-Unis d’Amérique.
Chez la petite fille, c’est également le couvre-chef qui attire l’œil : un bonnet phrygien. Symbole de la République française et de la liberté, il est l’attribut privilégié de Marianne. Elle est vêtue d’une jupe rouge et d’un corselet noir porté sur un chemisier blanc. Ces éléments sont caractéristiques du costume traditionnel alsacien comme il tend à se généraliser au cours du 20e siècle. Elle incarne la France.
L’innocence comme support de propagande
Tout au long de la Grande Guerre, une propagande de grande ampleur est mise en œuvre pour maintenir le moral des Français. Très utilisées par la population, les cartes postales sont un médium de prédilection pour diffuser des messages patriotiques.
Le costume de la petite Marianne rappelle que le territoire de l’Alsace-Lorraine a été cédé à l’Empire allemand en 1871. Sa récupération devient l’un des enjeux de la Première Guerre mondiale pour la République.
De son côté, le jeune soldat tient de la main gauche un immense « Stars and Stripes ». Drapeau officiel des États-Unis d’Amérique, il surplombe les deux enfants et s’enroule autour de la jeune fille comme une cape protectrice.
L’amitié franco-américaine sur le devant de la scène
Le 6 avril 1917, les États-Unis quittent leur neutralité pour s’engager aux côtés des Alliés dans la Première Guerre mondiale. Si les raisons de cet engagement sont plus économiques que morales, la propagande de l’époque préfère mettre en avant l’amitié franco-américaine. Les Américains viennent payer leur dette aux Français qui les ont soutenus dans la guerre d’indépendance près de 150 ans plus tôt.
Cette aide inespérée, dans un conflit qui s’embourbe et qui cause la mort de millions de personnes, est amplement relayée par les médias. L’effort promis par les États-Unis est sans commune mesure : plus de deux millions de soldats, une aide financière colossale, des dizaines de milliers d’usines et de mines, une flotte au tonnage exceptionnel… Partout, l’entrée en guerre de ces sauveurs providentiels est relayée comme l’événement décisif qui amène une victoire imminente.
Et Saint-Nazaire alors ?
Si la ville est éloignée du front de guerre, elle reste un témoin de premier plan à l’entrée en guerre des États-Unis. Entre 1917 et 1920, des centaines de milliers de soldats américains passeront par le port. Saint-Nazaire devient même le quartier général de la base n°1. Une histoire racontée en trois volets grâce au fonds photographique patrimonial conservé à l’Écomusée :
Au cœur de la base américaine n°1
Saint-Nazaire à l’heure américaine
Belle découverte !